‘Parmi les dix termes que Ségolène Royal a déposés à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), ‘université populaire’ a provoqué une tempête, et la présidente de Poitou-Charentes a dû y renoncer. Personne, en revanche, ne lui dispute le label ‘ordre juste’. Ni la droite qui aime l’ordre, ni la gauche qui défend la justice. L’association des deux mots paraît incongrue.
Ségolène Royal n’a rien inventé. L’ordre juste figure dans la Somme théologique de saint Thomas d’Aquin, publiée au XIIIe siècle, avant même la création de l’INPI. Le terme a été repris dans une encyclique par Benoît XVI, confronté ces jours-ci à des désordres ecclésiastiques qui font de son pontificat un chemin de croix permanent. L’Internationale socialiste elle-même réclamait en 1996 ‘un ordre mondial juste et paisible’. Pour breveter la marque à son nom, l’ex et future candidate a dû retirer les adjectifs. ‘Ordre juste’ tout court donne des boutons à la gauche française : aucun autre dirigeant ne veut manger en public de ce pain-là. Mais imaginez un peu le tollé si Ségolène Royal s’était approprié ‘l’ordre économique mondial, juste, paisible, républicain, citoyen et ordonné’.’